2022 : quels impacts du climat sur l’agriculture bretonne ?

Outre les facteurs économiques (hausse des coûts de production, notamment énergétiques …) l’agriculture fait face aux aléas et changements climatiques. L’intensité et la durée des vagues de chaleur qui se sont succédé en toutes saisons au cours de l’année 2022 ont impacté la productivité des filières végétales et animales et par conséquent le rendement et la qualité des produits.

Un impact sévère mais variable selon les filières

Les cultures maraichères semblent avoir été plus impactées par les fortes températures que par le manque d’eau (cycle réduit, décalé dans le temps, calibre des produits non conforme à la vente, rendement insuffisant par rapport aux frais de récolte …). Des possibilités d’irrigation ont été attribuées aux agriculteurs pour assurer la levée des semis et l’installation des plantations, la croissance des plantes et enfin une qualité de production commercialisable. Le manque d’eau a été particulièrement préjudiciable pour le maïs, surtout pour les semis tardifs et en sols peu profonds. Dans certains secteurs, l’ensilage a été exceptionnellement possible dès le début du mois d’août ! Concernant la filière animale, la sécheresse installée très tôt dans l’année ainsi que les premiers épisodes caniculaires de l’été ont provoqué l’arrêt de croissance et un dessèchement de l’herbe dans toute la région, même et surtout dans le Finistère1. Le volume et la qualité des productions fourragères ont été fortement dégradés (25% de déficit de pousse sur prairies permanentes en juillet ; 37% de déficit en biomasse sèche sur les rendements maïs à l’automne)2. Une partie des stocks de fourrage pour l’hiver a été utilisée pour pallier le manque d’herbe en saison végétative, d’où un risque de manque de fourrage cet hiver. Les conditions climatiques « extrêmes » ont aussi mené à des changements de pratique, comme le maintien des animaux à l’intérieur en journée pour éviter les stress physiologiques, limiter les piétinements des prairies et favoriser la repousse de l’herbe. Les céréales et le colza semblent s’être montrés plus résilients à ces extrêmes climatiques, avec des rendements proches de la moyenne au dire d’experts.

Des opportunités nouvelles en émergence ?

Si les impacts sur la ressource en eau et l’agriculture en général sont avérés et plutôt néfastes avec nécessité d’adaptation, les conditions climatiques régionales offrent cependant de nouvelles opportunités de cultures annuelles (ex. cacahuètes, pastèques, pois chiches, patates douces, soja…) ou pérennes (ex. amandiers ou vigne). Le cas de la vigne est exemplaire.

La multiplication des superficies en vigne dans notre région résulte en premier lieu d’un changement réglementaire3 intervenu en 2015 dans les régimes d’autorisation de plantations. Mais le développement de la viticulture en Bretagne marque indéniablement l’ampleur des impacts régionaux du changement climatique. Le réchauffement observé depuis plusieurs décennies offre en effet des conditions favorables à la croissance de la vigne et à la maturation des raisins et donc à la qualité du produit final, confortant ainsi les projets viticoles professionnels en Bretagne. Les indices bioclimatiques pour la viticulture calculés pour 2010-2020 indiquent, à certains endroits de la Bretagne, des conditions thermiques similaires à celles d’Angers sur la période 1951-19804.

Photo 1 : Parcelle de vignes en Ille-et-Vilaine. ©V. Bonnardot, 2020

Un millésime 2022 prometteur?

Si les plantations de l’année ont souffert et parfois nécessité un arrosage, les conditions de sécheresse ont en revanche permis de réduire le développement de maladies cryptogamiques. Les fortes chaleurs (le seuil de 40°C a été atteint dans certaines parcelles de vignes) ont ralenti le processus de maturité mais les conditions thermiques sur l’ensemble de la saison végétative ont permis d’obtenir une bonne teneur en sucre dans les baies des cépages à maturité précoce (comme le Chardonnay ou le Pinot noir). Ces taux de sucre ont permis d’aboutir, comme par exemple en Val de Rance, à un potentiel alcoolique idéal pour la production de vins effervescents dès début septembre ou pour la production de vins tranquilles blanc ou rouge dès la troisième décade de septembre.


  1. Chambres d’agriculture de Bretagne, info sécheresse ↩︎
  2. Institut de l’élevage IDELE, suivi agroclimatique de l’année 2022 ↩︎
  3. Journal officiel, Décret n° 2015-1903 du 30 décembre 2015 ↩︎
  4. Bonnardot et al (2020), https://hal.science/hal-02934910 ↩︎