2022 : une année climatique record pour la Bretagne ?

L’année 2022 a été marquée en Bretagne comme ailleurs dans le monde par des conditions météorologiques et climatiques remarquables. À Rennes et à Brest, il s’agit de l’année la plus chaude jamais enregistrée : la moyenne annuelle a dépassé de près de 4 dixièmes de degrés l’année record antérieure (2020). Les valeurs moyennes trentenaires sont dépassées d’un à plus de deux degrés selon les stations et la période de référence. Pour autant, si nous continuons à émettre autant de gaz à effet de serre, il est très probable que la météo observée en 2022 devienne tout à fait banale à la fin du siècle.

2022, l’année la plus chaude jamais enregistrée en Bretagne…

Presque tous les mois de 2022 ont connu des anomalies positives de températures : malgré deux épisodes de froid remarqués début avril (gel printanier) et début décembre, l’essentiel de l’année a été marqué par des vagues de chaleur et une douceur remarquables. Trois épisodes caniculaires se sont ainsi succédés de juin à juillet avec des records absolus battus le 18 juillet : plus de 40 degrés à Rennes comme dans le nord Finistère, du jamais vu ! Le nombre de jours chauds (plus de 25°C) ou très chauds (plus de 30°C) a été sans précédent presque partout. La douceur s’est poursuivie en octobre, mois présentant l’écart positif à la normale le plus fort, et jusqu’à la fin de l’année avec un 31 décembre qui a aussi battu un record historique (plus de 18°C à Rennes !). L’année 2022 a également été marquée par une sécheresse intense, résultat de forts déficits pluviométriques (quasiment pas de pluie en juillet) et d’une forte évaporation due aux températures élevées.

La variabilité interne du climat continuera de générer des années plus ou moins atypiques. Mais si une année prise isolément ne constitue pas une « preuve » en soi, la multiplication des années chaudes au cours de la dernière décennie est une conséquence claire du changement climatique : il est donc intéressant de comparer cette année 2022 à ce que pourrait être le climat futur de la région. On peut utiliser pour cela les données des modèles climatiques et les projections pour différents scénarios d’émissions de GES. 

… Mais qui, avec le changement climatique, sera une année « banale » dans le futur !

L’année 2022 se classe ainsi, en termes de température annuelle à Rennes comme à Brest, au niveau de ce que sera la moyenne en fin de siècle pour le scénario intermédiaire (RCP4.5) du 6e rapport du GIEC. Cette valeur 2022 serait donc dépassée à peu près un an sur trois ou quatre en milieu de XXIe siècle et une année sur deux en fin de siècle ; la température moyenne annuelle aura alors augmenté de 2 à 3 degrés par rapport aux « normales » des années 1951-1980 (figure 2). Dans le scénario le plus pessimiste (RCP8.5), cette valeur de 2022 serait systématiquement dépassée en fin de siècle et la moyenne annuelle s’établirait à plus de 4°C au-dessus de celles de l’après-guerre ! On peut ainsi caractériser l’année 2022 comme ce qui sera une année moyenne en milieu de XXIe siècle mais qui sera, en fin de siècle dans un scénario pessimiste, comme le souvenir d’une année… fraîche !

Au-delà de ces valeurs moyennes, les fréquences des épisodes de gel et de chaleur évoluent également. À Rennes et à Brest, le nombre de jours de gel observés depuis 1950 a diminué d’un tiers environ tandis que le nombre de jours très chauds (plus de 30°C) a augmenté à peu près dans les mêmes proportions (figure 3). Dans le futur, quel que soit le scénario, le nombre de jours de gel devrait continuer à décroître, voire à disparaître certaines années sur le littoral (comme ce fut déjà le cas à Brest en 2020) ; mais les années avec un nombre de jours de gel significatif existeront toujours et l’hypothèse de gelées tardives impactant une végétation plus précoce restera forte. Le nombre de jours très chauds record en 2022 (8 à Brest, 25 à Rennes) sera banal en milieu de siècle et presque toujours dépassé en fin de siècle avec le scénario pessimiste : certaines années connaîtront même plus de 50 jours très chauds à Rennes (le double de 2022 !).

Figure 3 : nombre annuel de jours de de gel par an (température minimale inférieure à 0°C) et de jours très chauds à Rennes (température maximale supérieure à 30°C). Source: météo France et portail DRIAS ; réalisation HCBC.

L’évolution future des précipitations est quant à elle plus incertaine avec des divergences selon les modèles et les scénarios : si le volume annuel évolue peu, le plus probable est une baisse pendant l’été et une hausse en hiver (figure 4). Ce renforcement moyen des contrastes saisonniers est susceptible de se traduire par une recrudescence des crues de saison froide et des sécheresses estivales apportant une touche de « méditerranéisation » du climat breton.

Figure 4 : Evolution saisonnière des précipitations en milieu de XXIe Siècle par rapport à l’actuelle pour différents modèles et scénarios. Source: https://www.creseb.fr/projet-democlim/