La 2ème édition du forum « Climat et territoires » s’est tenue le 23 mai 2024 à Brest, en partenariat avec l’Université de Bretagne Occidentale et Brest Métropole, sur le sujet du littoral breton face aux défis climatiques. La participation de 300 personnes issues de divers horizons a une fois de plus permis de favoriser le dialogue entre la communauté scientifique et les acteurs de l’action publique locale. L’avenir du littoral, dans une région avec plus de 2000 km de trait de côte, a suscité des questionnements approfondis : quelles activités locales impactées par le changement climatique ? Quelles solutions politiques à mettre en place ?
Une journée de tables-rondes et d’ateliers sur les risques climatiques littoraux
Après avoir été accueillis par Yves Quéré, Vice-président à l’UBO en charge des Transitions, François Cuillandre, Président de Brest Métropole, et Loïg Chesnais-Girard, Président de la Région Bretagne, un temps dédié à l’état des connaissances, avec Vincent Dubreuil (co-Président du HCBC, géographe) et Nicole Roux (membre du HCBC, sociologue) a permis de rappeler l’ampleur du changement climatique sur le littoral breton.
La matinée s’est poursuivie par deux tables rondes. La première : « Comment faire face à la montée du niveau de la mer ? », animée par Anne-Marie Tréguier (co-Présidente du HCBC, océanographe), a abordé la nécessité d’améliorer l’information sur les risques pour les acheteurs immobiliers et d’adopter des mesures plus proactives pour préparer les activités et infrastructures à un littoral en mouvement. La docteure en géographie Eugénie Cazaux a mis en lumière le paradoxe entre l’augmentation des risques côtiers et la hausse des prix immobiliers sur le littoral, soulignant une faible prise en compte de ces premiers par le marché immobilier. Représentant le secteur des assurances, Daniel Caugant (Crédit Mutuel Arkea), a détaillé l’importance de la solidarité dans la gestion des risques climatiques, tout en précisant les travaux législatifs en la matière. Raphaël Rapin, maire de Guissény, a évoqué les défis rencontrés par les élus locaux en termes de tempêtes et risques d’érosion/submersion, en insistant sur l’importance d’une stratégie à long terme et d’une gestion différenciée selon les particularités territoriales. Enfin, Solenn Guegueniat (directrice des ports à la Région Bretagne) a présenté les efforts de la collectivité pour intégrer l’adaptation au changement climatique dans la gestion des ports, avec des exemples concrets tels que la gare maritime de Brest.
La deuxième table-ronde a clôturé la matinée en posant la question « Quels risques liés au réchauffement et à l’acidification de l’océan ? ». Sabine Roussel (membre du HCBC, chercheuse en biologie marine et aquaculture) a invité des experts à discuter des impacts de l’acidification et du réchauffement de l’océan sur la biodiversité et les acteurs économiques. Ceux-ci ont souligné l’urgence de mesures d’adaptation et d’atténuation, ainsi que l’importance de la coopération locale. Fabrice Pernet (chercheur en biologie marine et aquaculture à l’Ifremer) a expliqué que l’acidification des océans affectera gravement les coquillages et réduira la biodiversité fonctionnelle des écosystèmes marins. Caroline Le Saint (chargée de mission environnement au Comité régional de la conchyliculture Bretagne nord) a détaillé les impacts du changement climatique sur la conchyliculture, comme la reproduction inattendue des huîtres creuses au nord de la Loire et l’évolution des prédateurs. Daniel Cueff (vice-Président « Mer et Littoral » au Conseil Régional de Bretagne) a, quant à lui, souligné l’importance de la recherche pour comprendre ces phénomènes complexes et essayer d’anticiper au mieux les impacts en termes d’activités économiques et de changement d’habitudes alimentaires. Laurent Péron (Président de TerraRade et vice-Président de Brest Métropole en charge du littoral et des espaces sensibles) a discuté de la dégradation de la qualité de l’eau dans la rade de Brest et des efforts de l’organisation Terra Rade pour coordonner les actions à l’échelle des bassins versants.
Après un déjeuner végétarien et convivial préparé avec soin par les équipes du CROUS de Brest, l’après-midi était tournée vers l’interactivité avec 8 ateliers différents en petits groupes. La visite d’Océanolab a offert une plongée immersive dans la recherche menée à Océanopolis, mettant en avant des projets d’observation de l’acidification marine et d’utilisation des algues pour la bioremédiation. La balade urbaine co-organisée avec Brest Métropole a, en parallèle, exploré les initiatives de Brest pour gérer les eaux pluviales et promouvoir la biodiversité en ville, tout en abordant le rôle du réseau de chaleur. Deux ateliers ont quant à eux permis de discuter de l’amélioration du dialogue entre politiques et scientifiques, ainsi que du soutien aux collectivités littorales avec le dispositif Litto’risques. Le jeu sérieux « Planet C » a proposé une simulation interactive pour comprendre les dynamiques de gestion des ressources littorales, et La Fresque Océane a sensibilisé les participants aux impacts humains sur l’écosystème marin et aux actions nécessaires pour sa préservation. L’Agence Bretonne de la Biodiversité a animé son atelier sur les solutions d’adaptation fondées sur la nature (SAfN), en démontrant avec des études de cas comment les écosystèmes côtiers peuvent fournir des solutions durables face aux impacts du changement climatique. Enfin, l’atelier interactif « 2tonnes » a plongé les participants dans un futur bas-carbone en 2050.
La journée s’est enfin conclue de manière inspirante avec l’intervention de Valérie Masson-Delmotte, qui a souligné l’importance de l’action collective face aux défis climatiques et nous a éclairés sur la place occupée par les scientifiques du climat à différentes échelles politiques.
Retrouvez ci-dessous toutes les captations vidéo de la journée du 23 mai :
Une conférence grand-public sur le climat et la biodiversité
Pour ouvrir l’événement au grand public, une conférence-débat a également été organisée la veille au soir, le 22 mai à Océanopolis, en partenariat avec la Fondation Breizh Biodiv, permettant de faire le lien entre deux événements majeurs pour la préservation de l’environnement : la Journée Régionale de la Biodiversité et le Forum du Haut Conseil Breton pour le Climat. Cette soirée, qui a attiré plus de 200 personnes, a débuté par une conférence magistrale de Valérie Masson-Delmotte, paléoclimatologue, membre du Haut Conseil pour le Climat et coprésidente du groupe n°1 du GIEC de 2015 à 2023. Explorant les connexions entre le changement climatique et l’érosion de la biodiversité, elle a montré les chemins exigeants mais nécessaires de la décarbonation et les bénéfices que pourraient en tirer les sociétés humaines et le monde du vivant. Cette présentation a ensuite été suivie d’une table-ronde avec Loïg Chesnais-Girard, Gilles Bœuf, Loïc Hénaff, Maeva Bourel, Jean-Louis Etienne et Anne-Marie Tréguier. Les conditions du passage à l’action ont été discutées et notamment le levier fiscal, les aides aux entreprises, le financement bancaire ainsi que la bonne appropriation des connaissances scientifiques.
Publié le 03 juin 2024