La 1ère édition du forum « Climat et territoires » s’est tenue le 2 juin 2023 à Lorient, en partenariat avec Lorient Agglomération et l’Université de Bretagne Sud (UBS), dans l’objectif de décloisonner les frontières entre scientifiques, techniciens et politiques. Durant toute une journée de tables-rondes et d’ateliers, près de 300 personnes ont ainsi pu apprendre et échanger sur les sujets de l’adaptation aux risques climatiques et de la résilience des territoires bretons.
Une journée de tables-rondes et d’ateliers dédiée aux risques de sécheresses et de chaleurs extrêmes
Après avoir été accueillis au sein de l’UBS par Sylvie Pimbert, la Vice-présidente Responsabilité sociétale et environnementale, le Président de la Région Bretagne Loïg Chesnais-Girard ainsi que les co-présidents du HCBC Vincent Dubreuil et Anne-Marie Tréguier ont ouvert officiellement ce premier forum. Au programme de la matinée : deux tables-rondes sur l’analyse climatique de l’été 2022 et sur les actions d’adaptation pertinentes pour la Bretagne.
La sécheresse de 2022 : une nouvelle perception des risques climatiques
La première table-ronde, intitulée « Nouvelle perception des risques et extrêmes climatiques : l’exemple de la sécheresse 2022« , avait pour but d’explorer les risques générés par l’extrême sécheresse de 2022 dans les territoires et la façon dont ceux-ci avaient été gérés par les différents acteurs.
Gérard Gruau, biogéochimiste membre du HCBC, a commencé par rappeler en introduction que l’été 2022, avec ses chaleurs extrêmes et son déficit pluviométrique renforcé par la sécheresse du printemps, a fourni un cas d’école des nouveaux risques générés par le changement climatique, avec des impacts multiples et croissant tant sur les activités humaines (conflits d’usages entre l’alimentation en eau potable des habitants et touristes, l’irrigation agricole et la production industrielle) que sur les écosystèmes (stress sur les milieux aquatiques générées par les réductions de débits, prolifération des espèces invasives, etc)
Bruno Ricard et Thierry Eveno, respectivement Vice-Président en charge du pilotage stratégique de la ressource en eau de Dinan Agglomération et Vice-Président en charge du climat, de la biodiversité, de l’eau et de l’assainissement de Golfe du Morbihan Vannes Agglomération, ont poursuivi cette présentation générale par un exposé de la situation de leurs territoires lors de l’été 2022. Leurs deux récits ont permis d’opérer une comparaison entre une collectivité du nord-est de la Bretagne qui a failli être en rupture d’eau potable au début de l’automne, et une collectivité de la côte sud pour laquelle la situation a été moins tendue et qui a fait preuve de solidarité. La directrice générale des services Eau du Morbihan, Françoise Jehanno, a poursuivi ces présentations en évoquant la façon dont la sécheresse 2022 a été perçue du point de vue d’un producteur et distributeur départemental d’eau. Elle a décrit la façon dont certains réseaux d’eau interconnectés ont pu s’entraider durant la crise ainsi que des potentielles pistes d’incitations ou de réglementations pour réduire la consommation d’eau sur le long terme.
Charles David, en tant que chargé de mission « Eau et littoral » de la Chambre d’agriculture de Bretagne, a quand à lui rappelé les baisses de rendement agricoles connues lors de l’année 2022 ainsi que les stratégies d’adaptation à mettre en place à l’échelle de l’animal, de la parcelle ou de l’exploitation. Hélène Anquetil, ingénieure de la direction Bretagne de l’OFB, a enfin mentionné les principaux impacts du manque d’eau sur les écosystèmes aquatiques et les instruments de suivi mis en place pour les analyser.
Comment parvenir à la résilience en Bretagne ?
Après avoir appréhendé les nouveaux risques climatiques, la 2ème table-ronde, intitulée « Résilience et capacités d’adaptation« , souhaitait aborder les enjeux de définition et de gouvernance propres aux politiques d’adaptation. Béatrice Quenault, économiste à l’Université Rennes 2 membre du HCBC, a d’abord défini le concept de résilience, en précisant que le mot ne renvoyait pas à un simple « ajustement » des pratiques et des modes de production mais revêtait bien une dimension profondément « transformatrice ». Le Vice-Président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable au Sénat, Ronan Dantec, a par la suite rappelé que pour mettre en œuvre des solutions d’adaptation à la hauteur des enjeux, l’Etat a désormais fait le choix de se fonder sur un scénario de réchauffement climatique de +4°C pour la France d’ici 2100 et de rédiger une 3ème version actualisée du PNACC (Plan national d’adaptation au changement climatique). Le Vice-Président de la Région Bretagne en charge du climat et des mobilités, Michaël Quernez, a lui présenté le cadre d’action de la collectivité, en revenant à la fois sur les politiques menées dans le cadre de la stratégie « Breizh Hin » votée en 2019 et à la fois sur le travail s’effectuant en interne pour adapter l’ensemble des responsabilités régionales au changement climatique.
Du côté des territoires, Bruno Paris, Vice-Président en charge de la transition écologique à Lorient Agglomération, a présenté les enjeux du manque de disponibilité de la ressource en eau à Groix ainsi que des pistes de solutions pour y remédier. Le politiste de Science Po Bordeaux Andy Smith a lui apporté un regard extérieur à la situation bretonne, en exposant les résultats du projet de recherche PECAPLO, qui consistait en une comparaison inter-régionale de l’appropriation des PCAET. Observant une diversité d’appréhension du « problème » climatique entre territoires et entre acteurs d’un même territoire, le chercheur a souligné l’importance du volontarisme politique sur cette thématique.
Retrouvez ci-dessous toutes les captations vidéo de la journée du 2 juin :
9 ateliers pour affiner le constat et dégager des pistes d’actions concrètes
Après un déjeuner en plein air derrière le bâtiment du Paquebot, les participants se sont rendus dans les 9 ateliers organisés pour l’après-midi.
La balade urbaine dans Lorient, animée par Vincent Dubreuil, Thibaut Lecompte et les agents de l’intercommunalité, ont permis de mettre en avant les différentes vulnérabilités liés au phénomènes d’îlot de chaleur urbain ainsi que les aménagements d’adaptation pertinents pour préserver la fraîcheur en ville.
En parallèle, au sein de l’UBS, la fresque du climat et les Ateliers d’adaptation au changement climatique ont été déployés par des agents de la Région Bretagne pour apporter aux participants une vue d’ensemble des impacts du changement climatique ainsi qu’une méthode d’action pour éviter la maladaptation sur un territoire. L’Agence Bretonne de la Biodiversité a également proposé son atelier sur les solutions d’adaptation fondées sur la nature pour faire réfléchir les personnes présentes aux atouts et potentialités des écosystèmes face au changement climatique. Trois jeux sérieux ont également été animés. Le premier, « Mission résilience« , immergeait les participants dans le rôle d’élus locaux devant transformer leur territoire pour s’adapter aux chocs énergétiques, sanitaires et climatiques, tout en veillant à l’acceptabilité sociale. Le deuxième, « Trajectoire eau et territoire« , avait pour objectif de revenir sur le fonctionnement du cycle naturel de l’eau et de trouver les bons leviers pour préserver cette ressource précieuse. Le troisième, « COP 28 de Lorient« , constituait en une simulation de négociations climatiques internationales où les participants avaient pour mission de s’accorder sur des objectifs de réduction de gaz à effet de serre équitables entre chaque pays. Pour les acteurs universitaires, un atelier « Ma terre en 180 minutes » était également proposé afin d’amorcer une réflexion sur l’impact environnemental de la recherche et construire des scénarios de réduction de l’empreinte carbone des laboratoires. Enfin, un atelier d’approfondissement des tables-rondes était animé par des membres du HCBC, sous forme de « world café », afin de faire échanger les élus, techniciens et scientifiques sur le constat de la matinée et dégager des pistes d’action concrètes pour l’avenir.
Une soirée conférence grand-public sur le concept de sobriété énergétique
De 20h00 à 22h00 au Paquebot de l’UBS, le HCBC a eu le plaisir d’accueillir la docteure en ingénierie énergétique et co-autrice principale du volet 3 du GIEC Yamina Saheb, pour une conférence-débat dédiée à la question de la sobriété. A travers sa présentation et les échanges avec le public, Yamina Saheb a pu répondre à ces questions : en quoi la sobriété, récemment repris par les plus hautes instances de l’Etat, se distingue-t-il d’autres termes comme l’austérité ou l’efficacité ? Qu’implique-t-il réellement pour notre quotidien ? Pourquoi est-il maintenant mis en avant par le GIEC comme un outil essentiel de réduction de nos émissions de gaz à effet de serre ?
Publié le 03 juin 2024